7ème semaine de Pâques année A – Ac 25, 13-21 ; Ps 102 (103) ; Jn 21, 15-19
Vous vous souvenez probablement de la fin de l’évangile d’hier, sinon je fais une petite répétition. C’est le discours d’adieu de Jésus à ses disciples : il prie pour eux, il prie pour leur unité. Dans l’extrait que nous avions hier, Jésus parle à son Père de ses disciples et il dit “Je leur ai fait connaître ton nom et je te ferai connaître” –ça va continuer, donc c’est pour nous. Et il explique “Pour que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux, et que moi aussi, je sois en eux.” Le discours d’adieu de Jésus dans son programme lorsqu’il parle de ses disciples, et donc de nous, à son Père, avant de les quitter, de vivre la Passion et tout ce que nous savons, voilà que Jésus parle d’amour…
Et le texte que nous avons aujourd’hui prend la suite, cette fois après la résurrection. Et il montre comment cet amour qui existe entre Jésus et son Père, qui peut se diffuser en nous, peut passer dans nos vies. Nous le savons bien, parce que ce récit est bien connu, il a souvent été médité, tout commence par un repas : Jésus vient prendre un repas, au bord du lac, avec ses amis. Le temps de la familiarité. Nous savons bien en ces temps que prendre un repas, ce n’est pas si évident que ça, mais que quand on le peut, il y a plein de choses qui se passent. Jésus prend à part Simon-Pierre et entre dans un dialogue très personnel avec lui. “Pierre, m’aimes-tu ?…” “Tu sais bien…” Et après, il y a toute l’histoire de Pierre et de Jésus qui se joue là, qui lui est rappelé. C’est quand même superbe de s’apercevoir qu’alors que nous pouvons être bousculés par tant de choses (il suffit d’ouvrir la télévision, la radio,… peut être pouvons-nous méditer sur la mort d’un humoriste bien connu, le discours d’un premier ministre, ou s’inquiéter de plein de choses… On est dans un flux permanent …) il n’empêche qu’à un moment, Jésus nous prend à part et nous dit “Si je veux te faire rentrer dans ma relation avec le Père, j’ai besoin d’entrer dans ton histoire personnelle : m’aimes-tu ?” Impossible de se réfugier dans la réponse des autres ! “M’aimes-tu ?” On connaît évidemment cette histoire! 3 fois “M’aimes-tu ?”, ça rappelle évidemment à Pierre son reniement… Nous avons chacun notre histoire avec Jésus.
Encore, c’est assez étonnant parce que dans ce travail que Jésus fait avec Pierre, quand on regarde le texte grec, les deux premières fois, il dit “M’aimes-tu ?” c’est : M’aimes-tu d’un amour divin, autrement dit soutenu par l’Esprit Saint ou pour voir ce que ça donne. Et Pierre à chaque fois répond “Tu sais”. La troisième fois c’est “M’aimes-tu déjà d’un amour humain ?” Autrement dit, est ce que tu m’aimes bien ? Est ce que je te suis sympathique, est-ce qu’on pourrait être amis tous les deux ? Jésus sait profondément s’adapter à chacune de nos capacités. Et à chaque fois, nous pouvons répondre “Tu le sais bien Seigneur.” Relation d’amour et c’est vraiment l’amour qui règne en Dieu, exactement celui qui règne entre le Père et le Fils, cet Esprit Saint qui permet d’établir un amour juste, ce n’est jamais simplement un amour pour soi, un amour-bulle, fusionnel. Lorsqu’on répond à la question de Jésus “M’aimes-tu”, qu’on essaie de l’aimer, on trouve toujours une mission, on devient responsable des autres : “Sois le berger de mes agneaux”.
Saint Pierre, le premier pape ; on imagine Paul VI, dont je rappelais tout à l’heure la mémoire, mais au fond, c’est vrai de tout un chacun.
Nous avions dans la première lecture quelqu’un qui a pris des fonctions : Festus. Dans le cadre de ses fonctions, il s’est aperçu que sans doute quelque chose ne collait pas dans l’arrestation et le procès de Paul. Donc il a simplement fait son travail, réouvert un dossier.
Ça peut nous arriver aux uns et aux autres, même sans être pape, d’avoir à prendre nos responsabilités, d’éclairer une situation. C’est encore de grandes choses, il est gouverneur. Nous ne sommes pas gouverneurs, mais puisque ce sont des questions dont on entend parler en ce moment, prendre un tout petit peu de temps après une eucharistie pour nettoyer une chaise, deux chaises, trois chaises, quatre chaises, pour que le peuple de Dieu puisse se rassembler. C’est une manière d’être le berger des agneaux de Dieu.
Chacun dans l’amour, ce n’est pas simplement un amour en cercle fermé avec Jésus, c’est un amour où on devient responsable des autres.
Puis, pour poursuivre le texte, il y a aussi dans ce dialogue, un peu comme ce que nous sommes les uns et les autres. On a toujours un peu besoin de savoir : mais Seigneur, qu’est ce que tu me réserves ? Et on a à la fin du texte “Quand tu étais jeune, tu mettais ta ceinture. Quand tu seras vieux, ce sera un autre qui te mettra ta ceinture.” Toute petite indication pour nous indiquer que la relation personnelle, inévitable, incontournable que nous avons avec le Seigneur, aura à se vivre au travers de l’évolution de notre vie. Et parfois des contraintes de notre vie : “Quand tu seras vieux, un autre te mettra la ceinture.” Autrement dit, toi tu ne seras plus capable.
Toute contrainte, et il me semble que nous en vivons quelques unes en ce moment, peut nous conduire à devenir témoin de l’amour ; à notre manière de les accepter. Pas pour les subir en les acceptant passivement, mais pour en faire l’occasion d’un approfondissement de notre relation avec le Seigneur. Pour bien vérifier que ce ne sont pas nos peurs, nos envies d’agir ou je ne sais quelles raisons, mais que c’est bien le Seigneur qui a l’intérieur nous travaille, que nous nous laissons habiter par son Esprit, et que par là, par la responsabilité que nous aurons continué à assumer des autres, le Christ pourra constituer son corps pour faire que dans le monde règne de plus en plus l’Esprit de Pentecôte.
Peut être que nous pouvons offrir au Seigneur nos contraintes d’aujourd’hui. En le remerciant parce que même ces contraintes sont pour nous une occasion d’entendre très profondément cette question “M’aimes-tu ?”