Père Gilles Rousselet
Fête des Saints Innocents – 1Jn 1,5-2,2 ; Ps 123 ; Mt 2, 13-18
Avec le génie propre à la liturgie, nous sommes vraiment plongés en plein cœur du mystère de Noël. Il me semble que cette année, avec le confinement, toutes les règles, les restrictions qui durent déjà depuis le mois de Mars et qui va se poursuivre encore, il me semble qu’on a eu la possibilité, par la grâce de Dieu bien sûr, de nous laisser toucher peut être par certains aspects du mystère de Noël qui pouvaient avoir tendance à être un peu effacés par les lumières artificielles des néons, des décorations, des cadeaux, de la consommation ; qui peuvent être de très bonnes choses : il y a quand même des commerçants qui vivent de ce commerce ; et puis aussi la joie que nous avons d’offrir des cadeaux et d’en recevoir. Et la joie d’être réunis en famille. Mais c’est vrai que nous avons aussi besoin de découvrir le mystère de Noël, de l’approfondir ; on peut dire qu’on le connaît puisque nous sommes chrétiens déjà de longue date. Mais enfin, c’est un mystère, c’est-à-dire qu’il n’a jamais fini de révéler la puissance, la richesse, la force de transformation qui est en son sein et qui ne demande qu’à se communiquer. C’est vrai que quand on aime, on ne peut jamais se lasser de la personne qu’on aime et on ne peut jamais dire qu’on la connaît définitivement… Qu’en est-il du mystère de Noël qui n’a jamais fini de nous révéler ses trésors insondables ?
Dieu s’est totalement révélé dans ce petit enfant et il a révélé son immense proximité. Dans cet enfant, né dans la crèche, dans cette nuit de Noël, c’est vraiment Dieu qui se révèle en plénitude et qui s’offre dans le plus grand abandon, dans la plus grande fragilité. Et en même temps, un certain nombre de signes montrent qu’il est venu pour donner sa vie : dans le récit de Saint Luc, il y a un certain nombre de références qui nous renvoient directement à la finale de l’évangile, quand Jésus va être déposé, entouré de ce linge et déposé au tombeau, comme Marie l’avant entouré de ces langes et déposé dans la mangeoire. Il y a d’autres signes comme cela, dans saint Luc en particulier, qui nous invitent vraiment à considérer que ce petit enfant Jésus qui signifie « Dieu sauve » est venu pour nous sauver.
Et évidemment il y a une transformation du monde et dans cette venue de la lumière (vous savez que dans le livre de la Genèse, Dieu crée la lumière et il sépare la lumière des ténèbres), l’incarnation de cette lumière divine qui est Jésus « lumière du monde » entre en conflit avec les ténèbres. On voit bien dans l’évangile ce combat terrible qu’il y a entre deux puissances qui s’opposent : Hérode qui veut absolument savoir où est l’enfant, non pas pour aller l’adorer, mais pour l’éliminer car il le perçoit comme un danger. Et ne pouvant pas l’éliminer, alors il va éliminer tous les enfants de l’âge de Jésus, pour être sûr de ne pas le manquer. On peut s’étonner : pourquoi Dieu qui est venu dans le monde pour nous sauver, n’a pas pu sauver la vie de ces enfants ? On ne sait pas bien combien il y en avait, mais même s’il n’y en avait qu’un, la question pouvait se poser… Et en même temps, pourquoi, depuis que l’humanité existe, il y a toujours des victimes qui sont mises à mort ? Nous savons bien sans porter de jugement, les nombreux avortements sont aussi des enfants victimes qui ne verront pas le jour… Et avec cette plainte, ces larmes de Dieu qui est vraiment notre Père et comme disait un enfant « qui nous aime comme une mère », qui souffre de toute vie qui ne peut pas s’épanouir sur cette terre.
On peut se demander pourquoi Dieu n’empêche-t-il pas la mort et la souffrance ? En tout cas, la réponse de Dieu est que lui-même l’a connue jusqu’au bout. Il a vraiment donné sa vie, il n’a rien retenu de toutes souffrances et de toutes violences qui s’exerçaient contre lui, pour tous nous ouvrir la résurrection. Il ne nous empêche pas de souffrir ou de mourir, mais il vient nous offrir la Vie Éternelle, une vie de bonheur et de joie qui nous est offerte totalement gratuitement.
Et nous avons, nous aussi, à entrer dans ce combat. Et le témoignage de Joseph, dans l ‘évangile, est vraiment important : c’est le témoignage de l’obéissance, de la soumission à la volonté de Dieu, qui le guide. Et il n’y a aucun doute que Dieu nous guide chacun par son Esprit Saint qui nous guide, qui éclaire notre conscience et que la désobéissance ne fait vraiment pas l’œuvre de Dieu, mais a des effets néfastes. Tandis que l’obéissance à la volonté de Dieu, l’obéissance de la foi, permet à Dieu de nous conduire dans la lumière et de faire rendre victorieuse la lumière qu’il est venu apporter au monde
Qu’en ce temps de Noël, ce temps de la Nativité, nous demandions vraiment à Jésus de nous révéler le mystère de sa présence, de sa proximité et de ce qu’il est vraiment venu accomplir dans notre vie. Pas nous empêcher de souffrir, mais de nous apporter la vie éternelle. Amen