Père Laurent de Villeroché
Samedi après l’Épiphanie – Jn 5, 14-21 – Ps 149 – Jn 3,22-30
Comme je vous le disais tout à l’heure, nous finissons le temps de Noël donc le bébé Jésus que vous avez devant l’autel, va avoir beaucoup grandi aux messes de ce week-end, puisque nous allons assister à son baptême. Le baptême avec évidemment Jean Baptiste qui est là. Nous avons la chance, nous qui sommes réunis pour cette messe du dernier temps du temps de Noël, nous, nous avons la chance d’avoir la suite de l’histoire ; donc que c’est un petit peu compliqué en termes de chronologie tout ça, mais nous nous avons la suite de l’histoire. On a Jésus qui se rend en Judée et qui baptisait, c’est la mention dans l’Écriture, où on voit que Jésus baptise. Nous savons qu’il y a eu des baptêmes puisqu’Il dit par exemple : « Baptisez-les ». Mais que Jésus lui-même baptise, ça c’est vraiment ce qu’on appelle un hapax en terme technique. Ça veut dire que les évangélistes ont été très discrets, parce qu’ils ne voulaient pas trop montrer que Jésus baptisait. Alors ça peut paraître un peu curieux mais on a l’explication dans le texte : Jésus baptise et Jean baptise et il y avait dans cette ambiance de l’époque un certain nombre de mouvements comme ça, où on baptisait. Pourquoi ? Là encore, nous avons l’explication dans le texte, un peu après le dialogue qui se passe entre le disciple de Jean et le juif, à propos des bains de purification. C’est à dire qu’il y avait à l’époque de Jésus cette ambiance, où on sentait bien que pour être disponible pour Dieu, il y avait des choses à purifier. Donc on baptisait pour le pardon des péchés, on baptisait pour être purifié et Jean évidemment était un des principaux représentants de ces mouvements-là. Et on s’arrange pour ne pas trop dire que Jésus baptisait… Vous vous rappelez que les évangiles sont écrits après la mort de Jésus : c’est pour que l’on ne confonde pas Jésus avec tous ceux qui baptisaient du temps de Jésus. Parce qu’avec le baptême de Jésus, il y a beaucoup plus qu’une sorte de purification où après on serait tout propre, tout net et on pourrait prier Dieu. Avec Jésus ce n’est même pas seulement le pardon des péchés, avec Jésus c’est entrer dans une aventure ; où par exemple on découvre que l’on est fils adoptif, à la manière de Jésus.
Quand on est baptisé au nom de Jésus, on entre dans une relation tout à fait unique avec lui, puisque vous l’avez aussi à la fin dans le texte : ce rapport entre un époux et une épouse. Époux, épouse et quand on a ce texte-là, ça veut dire qu’on n’est pas baptisé pour soi personnellement, mais pour faire partie d’un corps, qui va être le corps de l’épouse, il y a encore de très, très belles images dont parlera Saint Paul : le rapport entre la tête et le corps, entre l’époux et l’épouse. Tout cela veut dire qu’on entre dans une relation d’intimité avec Jésus.
Donc il y a bien plus qu’un baptême de purification, même si dans beaucoup de cas, il faut commencer par-là, parce quand on a fait un bon nettoyage, on peut accueillir l’époux chez soi. Alors on a cet épisode assez étonnant où on sent qu’il peut y avoir une rivalité, pas tellement entre Jésus et Jean-Baptiste, ils se connaissaient bien, ils s’entendaient bien, c’était clair entre eux ; on l’a dans la suite du texte, mais entre les disciples, sur quelle est la valeur du baptême qui est donné ? Quelle est la valeur de ce qui se passe ? Et vraiment Jean Baptiste a une position absolument parfaite, lui, il sait très bien que la jalousie peut envahir les cœurs. Quand l’autre réussit parfois on est jaloux de lui. Ça n’est pas le cas de Jean-Baptiste et de ce point de vue, il est pour nous un vrai exemple dans nos relations, les uns avec les autres. Parce que notre souci ce n’est pas être jaloux des autres, ou plutôt c’est un souci pour nous, parce que ça peut nous pourrir la vie. Notre souci doit toujours être la réussite de l’autre. Et quand on voit que l’autre réussit et que parfois il réussit mieux que nous, et bien réjouissons-nous si c’est pour le bien de Dieu. C’est bien ce qui se passe puisqu’on a cette superbe formule, quand il parle de lui : « Quant à l’ami de l’époux, il se tient là, il entend la voix de l’époux et il en est tout joyeux ». Souvent il suffit de se tenir là quand on voit la joie de ce qui se passe, entrer dans cette attitude un petit peu contemplative, émerveillée de la joie des autres. Si nous découvrons que cela peut être notre bonheur, ça devient aussi quelque chose d’extraordinaire…
On a à la fois une petite explication historique dans ce texte et en même temps des choses très, très précieuses pour rester heureux, se réjouir de la réussite des autres. Puis on a ce message extraordinaire de ce que produit le baptême : ça produit un type de relation entre chacun et le groupe de tous ceux qui aiment Jésus, ce rapport entre époux et épouse. Vous savez que dans les groupes chrétiens, dans toutes les équipes d’animation, entre nous, entre prêtres lorsqu’on en discutait vendredi encore en équipe pastorale, on se dit : «Il y a effectivement un certain nombre de chrétiens qui ne reviennent pas, alors qu’ils pourraient participer aux eucharisties, certainement un nombre de chrétiens qui ont du mal à revenir dans les groupes, alors que d’autres justement se disent que ça serait tellement extraordinaire de pouvoir se retrouver ». Peut-être que nous pouvons prier pour tous ceux qui se disent chrétiens, nos paroissiens, alors certains ont peur. La peur ça se respecte, mais priez vraiment pour ce corps du Christ que nous formons, parce que il y a la tête qui est là et qui les attend, il y a une partie du corps qui peut-être n’a pas compris qu’on est là pour être dans ce rapport, entre tête et corps, dans ce qui se passe entre une communauté chrétienne et le Seigneur qui est présent au milieu d’elle, c’est quelque chose de cette relation entre l’époux et l’épouse, il y a cette force, cette intimité, pas simplement de la purification, mais une relation absolument étonnante. Alors prions pour que nous soyons de plus en plus à le découvrir. C’est ma joie et elle est à son comble.