Père Gilles Rousselet
Conversion de Saint Paul, Apôtre – Ac 22, 3-16 ; Ps 117 ; Mc 16, 15-18
Quelques petites choses, quelques partages, à propos de la conversion de Paul. Paul ne parle pas de sa conversion. La fête est placée sous ce vocable « Conversion de Paul », mais Paul n’en parle jamais. Il ne parle pas de ce qu’il lui est arrivé comme d’une conversion. Et d’ailleurs, d’une certaine manière, vous savez que le cardinal Lustiger est juif devenu chrétien, ne parle pas de sa conversion, mais dit « Je suis un juif accompli ». Comment est ce que Paul parle de son expérience ? Quand il en témoigne, il parlait beaucoup de son zèle pour Dieu. Parmi tous les zélés de Dieu, il était parmi les plus zélés… Sur le chemin de Damas, il ne dit pas qu’il est aveugle, vous avez entendu ? C’est quand même éclairant : il dit que la lumière était tellement forte qu’il était ébloui. C’est comme quand vous prenez un flash en plein figure. On a souvent dit qu’il était aveugle pendant trois jours. Mais là, il dit que la lumière était tellement forte qu’il est empêché de voir. Vous n’avez qu’à regarder en pleine face une lumière forte, et vous verrez que vous ne verrez rien… C’est un peu comme quand on a de la buée sur les lunettes, mais c’est encore plus fort. C’est important parce qu’on dit que le baptême est une illumination. Et c’est pour ça que pour Paul ce n’est pas exactement une conversion, mais vraiment une réorganisation complète de ce qu’il est. C’est important, vous allez voir pourquoi.
La première chose, c’est qu’on dit que le baptême est une illumination. La lumière à laquelle était habitué Paul dans son zèle pour la Loi, est une lumière très terne, une lumière qui l’éclairait, mais pas bien. Vous voyez bien ce problème pour lire la Parole de Dieu : vous avez de bonnes lunettes, de bons yeux, mais comme il y a de la buée sur les lunettes, on ne voit pas bien. Et bien Paul, éclairé par cette lumière de la Loi, qui n’était pas une bonne lumière, n’y voyait pas bien. Et quand la lumière du Christ s’est manifestée à lui, dans son humilité. « Saul Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » « Qui es-tu Seigneur ? » « Je suis celui que tu persécutes. » Donc, Jésus se révèle à Saul comme celui qui persécute ses frères. C’est assez étonnant comme manière de se présenter. Et il comprend tout de suite : « Que dois-je faire ? ». Et donc, cette lumière du Christ, qui est différente de celle de la Transfiguration par exemple, est tellement différente que celle à laquelle était habituée notre ami Paul, qu’il est ébloui. Et qu’il va lui falloir trois jours, après cette mort et cette résurrection, pour devenir un être nouveau.
Ce qui est très beau, et c’est pour cela que ça nous concerne, c’est que, dans ce qui se passe, la grâce qui agit dans la vie de Paul réorganise toute sa vie. On pourrait dire que la rencontre avec le Seigneur va changer ma vie : oui, c’est vrai. Mais dans le sens où elle va réorganiser tout ce que Dieu nous a donné de bon : notre intelligence, notre liberté, notre sagesse, notre raison, notre corps, nos désirs… Tout, qui était comme désorganisé avant, en particulier par le péché ; mais aussi par de l’ignorance, et c’était le cas de Paul, tout cela va être réorganisé vers Dieu. Et donc la rencontre avec le Seigneur ne change pas fondamentalement notre personnalité, mais réorganise tout ce qui nous constitue vers le Royaume. On est comme un instrument à musique dont toutes les cordes seraient réaccordées pour jouer la musique que nous sommes appelés à jouer, on peut dire.
Quelqu’un qui disait « Illumine en toi le vitrail intérieur » : ta vie est un vitrail unique. Vous savez à quoi servaient les vitraux : en laissant passer la lumière, montrer la Parole de Dieu à des gens qui ne savaient pas lire. Quand, dans la rencontre avec le Seigneur, quand nous le laissons nous illuminer, on oriente le vitrail, et il est nettoyé. « Sois lavé de tes péchés en invoquant son nom ». Vous avez remarqué ça ? C’est quand même une vertu du nom de Jésus que nous avons à redécouvrir. « Sois lavé de tes péchés en invoquant son nom ». Souvent, on invoque le nom de Jésus dans notre paroisse, pour des prières de libération. On pratique ça, par exemple si vous écoutez les complies le soir, vous entendez qu’à la fin des complies j’invoque le nom de Jésus qu’il ait autorité sur votre vie, votre sommeil, votre demeure. Mais là, ce qui lui est dit, c’est « Sois lavé de tes péchés en invoquant son nom ». Le nom de Jésus nous libère, nous purifie, nous lave intérieurement : c’est assez extraordinaire, cette puissance du nom de Jésus ! Évidemment, ce n’est pas magique, ce ne sont pas des formules magiques, comme on utilise par exemple dans le reiki (surtout ne pratiquez pas le reiki, c’est vraiment très mauvais) mais en invoquant le nom de Jésus, comme celui que nous avons reçu à notre baptême.
Je vais arrêter là, avec notre ami Paul. Demandons au Seigneur la grâce de notre baptême, d’être illuminé, éclairé par la lumière du Christ, et pas par une mauvaise lumière, une lumière artificielle. Et demandons-lui de continuer à réorganiser tout notre être pour devenir véritablement ce que nous sommes appelés à être. Vous savez, dans l’évangile d’hier, ce qui est très beau, Jésus dit aux apôtres : « Je vous ferai devenir pêcheurs d’hommes », c’est-à-dire, vous êtes des pêcheurs, mais vous ne pêchez pas bien. La preuve, votre pêche, il n’y a pas de poissons… Mais si vous me laissez réorganiser tout ce que vous êtes, vous deviendrez des pêcheurs d’hommes, je vous ferai devenir des pêcheurs d’hommes.
Jésus nous dit par notre baptême : je vous ferai devenir ce que vous êtes appelés à être. C’est ça le programme de la vie. Et pourquoi sans priver ?
Amen