Père François Jourdan
4ème semaine du TO année impaire He 12, 18-24 ; ps 47, 2-4 ; Mc 6, 7-13
La 1ère lecture se fait l’écho de beaucoup d’attitudes religieuses dans toutes les religions du monde. Il y a toujours une montagne : c’est évocateur une montagne, ça nous pousse à aller plus loin. Alors bien sûr, il y a le Sinaï, il y aura les béatitudes (ce n’est pas une haute montagne), le sermon sur la montagne de Jésus, etc… On a aussi nous des collines inspirées en France dans différents endroits, mais nous voyons bien que c’est un langage symbolique bien sûr. Car quand Jésus envoie ses disciples, ce n’est pas sur la montagne et ce n’est pas avec des trompettes, nous le savons bien ; c’est ce que nous vivons d’ailleurs nous même dans la simplicité de la vie : c’est là où le témoignage porte et en particulier dans la souffrance justement. Là on ne trompe pas, c’est du solide, c’est du vrai.
Alors, en voulant prier pour les chrétiens persécutés en particulier eh bien nous mesurons aussi que c’est un témoignage, qu’il faut rechercher ce qui est pénible à vivre. Et nous devons être prêts aussi. Nous n’avons pas une persécution ici, bien qu’insidieusement, l’idolâtrie de l’argent et du pouvoir sont toujours là, et c’est un peu une manière aussi insidieuse de nous empêcher de vivre notre foi. Nous devons bien le voir.
Donc croire, c’est vrai que c’est une lutte et en même temps, le témoignage que nous pouvons donner à travers cette lutte, nous essayons de vivre le mieux possible notre foi, ça peut interroger d’autres personnes vous voyez. C’est très remarquable par ex. qu’en Iran et depuis des années, il y a des conversions au christianisme, alors que ça n’y porte pas ! Oui mais justement le témoignage même de ces chrétiens souffrants, mais fidèles et vivants de manière authentique, sans tambour ni trompette et sans monter sur des montagnes et faire de grandes choses pour se faire voir (tout de suite toujours l’esprit du monde), non pas du tout. Et c’est ça que le Seigneur nous demande.
J’aime beaucoup dans cet évangile, ce petit passage très simple, que d’ailleurs Saint Paul a repris pour lui-même : « Si on refuse de vous accueillir ou de vous écouter, partez et secouez la poussière de vos pieds, ça sera pour eux un témoignage » justement. C’est à dire qu’au lieu de faire comme certains des apôtres de Jésus, contre un village samaritain qui n’avait pas voulu l’accueillir, faire tomber le feu du ciel sur ce village et Jésus rabroue cette attitude, ce n’est pas ça du tout. Lui, il propose une autre manière, on pourrait l’appeler non violente, je crois que c’est le mot qui convient assez bien. Partez, d’accord on n’insiste pas, mais on vous montre quand même qu’on vous a apporté le témoignage de l’évangile. Vous êtes responsable maintenant de ce que vous allez en faire. La pression, c’est une pression non violente, mais on est lucide et ce n’est pas la fuite, comme ça, point final, pas du tout.
Je crois que c’est intéressant, c’est une autre manière de vivre avec les autres et de vivre le conflit, il y a ça qui est derrière. Là-dessus les chrétiens auraient dû être beaucoup plus en avance que les autres parce que c’est l’esprit du Christ et on ne l’a pas développé. Je peux vous le dire, j’ai beaucoup à dire parce que je suis en train d’écrire un livre, j’en suis à la page 80 sur les bases bibliques et théologiques, la non-violence active. Nous sommes très en retard, puisque je le rappelle assez souvent, sans pouvoir développer que c’est Gandhi, qui en lisant l’évangile : le sermon sur la montagne, il en a fait de la pub, pour le sermon sur la montagne, toute sa vie, c’est là qu’il a vu la non-violence, et qu’il l’a inventé de manière pratique. Ce que les chrétiens n’avaient pas fait. Il a fallu attendre un non chrétien, lisant l’évangile, pour nous montrer que l’évangile pouvait être efficace, mais d’une autre manière, dans un autre ordre, mais efficace quand même. Il a obtenu 300 millions d’habitants, l’Inde de son époque, qui a obtenu l’indépendance, contre une puissance étrangère qui était là depuis 3 siècles, avec la reine des Indes, la reine d’Angleterre, sans guerre c’est remarquable. Alors que nous, on est en train, on n’a toujours pas fini de se frapper la coulpe, pour la guerre d’Algérie, en ce moment dans la presse, on en parle c’est vrai.
L’innovation de cet esprit du Christ et y compris dans la manière de vivre la foi chrétienne : amour et vérité. On n’est pas reçu ? ça ne fait rien, on vous donne la vérité, on vous aime toujours, mais n’oubliez pas !