Père Laurent de Villeroché
Vendredi après les Cendres – année impaire – Is 58, 1-9a ; Ps 50 ; Mt 9, 14-15
Je ne suis pas sûr que nous ayons une religion tout à fait confortable. On pourrait se dire : « Bon, mercredi des Cendres, c’est le Carême, donc on ne se pose pas de questions, c’est le moment du jeûne, de telle heure à telle heure on jeûne, et puis après on fait autre chose » par exemple. Jésus passe son temps – et ça commence déjà dans la première lecture, donc – Dieu passe son temps finalement à nous dire de faire attention à nos automatismes, un peu comme on a dans le texte, lorsque les disciples de Jean-Baptiste s’approchent et puis posent une question : les disciples de Jésus ne sont pas dans les bonnes cases, ils ne respectent pas tout à fait les règles. Alors ça ne veut pas dire que les règles sont inutiles, ça ne veut pas dire qu’il ne faut pas se rappeler à certains moments que nous avons de la prière, du jeûne et du partage par exemple à vivre, ça depuis le mercredi des Cendres. Ce qui nous est rappelé peut-être fondamentalement dans tous ces textes, c’est que nous devons vivre tout cela dans la liberté, la liberté des enfants de Dieu. La liberté des enfants de Dieu qui, à certains moments, peuvent s’apercevoir qu’ils ne sont plus dans la présence de Celui qui est l’Époux. Parce qu’ils sont centrés sur eux-mêmes, ils oublient Dieu tout simplement, qu’ils oublient les autres : la première lecture nous rappelle ô combien il peut être important à certains moments de se ré-ouvrir à la conscience, parfois de soi encore une fois. Parce que quand on s’oublie on ne peut plus servir. Parfois de Dieu, parce que quand Dieu n’est plus dans une vie, évidemment nous sommes désorientés. Parfois des autres : encore une fois, le jeûne que je préfère… comme il est dit dans le Livre d’Isaïe est quand même un morceau absolument superbe pour nous rappeler ce qui peut faire jaillir la vie. Liberté dans notre manière d’appliquer les choses, parce que ce que Dieu souhaite par-dessus tout, c’est que cette vie naisse, une vie en nous, une vie par nous, une vie devant Lui pour la gloire de Dieu et le salut du monde.
Alors nous avons des moyens à prendre, mais pas des moyens par habitude, pas des moyens par comparaison sociale, pas ce genre de moyens-là. Et parce que nous percevons que nous avons besoin de redonner de la place finalement à ce qui est essentiel. Alors la lumière jaillira comme l’aurore, voilà ce qui finalement finalise tout.
Je termine juste par cette petite phrase qui est absolument superbe : nous passons notre temps – c’est dans l’ordination, c’est dans plein de choses – à dire, même la Vierge Marie : « Me voici, qu’il me soit fait selon Ta Volonté » par exemple. C’est totalement inversé dans Isaïe : « Alors si tu appelles le Seigneur répondra, si tu cries Il dira : Me voici » Un peu comme si c’est Dieu qui nous répondait ! Qui répondait à l’appel que nous lui lançons. Eh bien justement, peut-être que ce chemin du Carême – et pour cela prenons tous les moyens qu’il faut – peut-être que ce chemin du Carême c’est tout simplement de nous aider à réaliser que depuis notre baptême Il est là, Me voici, il est presque là à notre disposition pour la croissance de notre vie, de la vie des autres, de la vie du monde. Alors retrouvons ces chemins de l’Alliance, comme on dira dimanche à la messe, retrouvons l’essentiel, nourrissons-nous de cette Présence d’un Dieu qui est à nos côtés pour nous faire avancer sur les chemins de cette vie.
Amen